Au loin, une silhouette vêtue de brun s'avançait sur l'unique sentier qui menait au domaine. Indéniablement masculine, de haute taille, c'est à grands pas qu'elle vint enfin traverser le pont où de violentes bourrasques la secouèrent, rejetant en arrière le capuchon qui dissimulait son visage et le dévoilant ainsi aux yeux perçants qui pourraient éventuellement l'observer depuis le manoir... l'atmosphère était glaciale, tout comme la face de l'individu, qui ne laissait transparaître aucune expression. Il toisa froidement l'un des gardes qui encadraient le pont. Sa voix, tout aussi expressive que ses traits, s'éleva malgré le vent :
" 'Suis v'nu m'intégrer aux mercenaires. Sous invitation de Sancte. "
Les yeux gris dévisagèrent les hommes, méprisants. De toute évidence, le type se forçait à rester "cordial", et son allure entière laissait penser qu'il était loin d'être un enfant de coeur. Son mantel était troué, ses bottes maculées de boue, et sa main empoignait fermement un gourdin de fortune - il remplaçait, depuis peu, son épée brisée - dont le bois indélicat et bosselé trahissait la violence qui marquait ses voyages. Le garde le plus proche lui répondit aussitôt que son cerveau s'remit à fonctionner.
" C'quoi, ton nom, hé ?! Nous faut un nom, ou t'passes pas, gredin !
- Lukovigig ", lâcha le brigand, " Dis à Sancte que j'suis sa dernière recrue en date. Le type qu'a frappé un môme.
- Parole ? Et p'quoi tu l'a fait, salaud ?!
- Pas tes affaires, contente-toi d'passer le message... "
Ses yeux dévisagèrent son interlocuteur, le mettant au défi de répondre quoi que ce soit de plus. Peut-être était-ce sa mine qui effraya le garde, ou encore le fait qu'il soit invité ici par Sancte ? En tout cas, le message non formulé passa clairement, et le gus s'en fut pour prévenir... quelqu'un. Patient, le brigand - qui s'appelait en réalité Natorias - attendit, intérieurement curieux de voir quel genre de mercenaires se cachaient derrière les portes du manoir...